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temps qu’une disposition de tempérament, une conséquence de son éducation religieuse.

Des explications données à Philip par ses deux patrons, il résultait que depuis peu de temps ils avaient reçu coup sur coup plusieurs lettres anonymes, par lesquelles on les prévenait assez clairement, quoique en termes ambigus, de l’insolvabilité d’un fabricant de soie de Spitalfields, avec lequel ils étaient en relations suivies depuis un certain nombre d’années, et à qui, tout récemment encore, ils avaient consenti d’assez fortes avances. Ainsi prévenus, ils avaient sollicité leur mystérieux correspondant de leur faire connaître son nom, et, par la lettre arrivée le matin, toute satisfaction venait de leur être donnée à cet égard. Ce nom leur était inconnu ; mais certaines allusions prouvaient surabondamment que le signataire de la lettre était fort au courant des transactions pécuniaires survenues entre eux et le fabricant en question. Tout cela ne laissait pas de les intriguer fort ; aussi venaient-ils de décider qu’ils enverraient Hepburn à Londres, avec mission de prendre secrètement les informations les plus complètes sur la situation commerciale de ce même homme qu’ils s’enorgueillissaient, un mois plus tôt, de compter parmi leurs débiteurs.

Pendant ces révélations, Philip ne parut s’émouvoir en aucune façon ; il était purement et simplement très-attentif, et concentrait toute son intelligence sur le point qu’il s’agissait pour lui de bien comprendre ; plus tard il donnerait carrière à ses sentiments. Quand il dut s’expliquer, il le fit en très-peu de mots, et ses paroles, allant droit au but, satisfirent complétement ses patrons. Lui-même était ravi de cette mission qui réclamait l’exercice énergique de toutes ses facultés, et à laquelle néanmoins elles devaient suffire. Il fut donc convenu que, dès le lendemain, il partirait pour Hartlepool, d’où il