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décidée… Mais si Charlie Kinraid ne se conduit pas trop mal, peut-être sera-t-il écouté.

— Charlie Kinraid ?… qui voulez-vous dire ?

— Ce specksioneer dont je vous parlais ; … un cousin que j’ai.

— Et vous croyez qu’il s’occupe de vous ? » demanda Sylvia d’un ton bas et fervent, comme s’il s’agissait de quelque mystère sacré.

Mais Molly répondit simplement :

« Laissez-moi un peu tranquille. »

Et Sylvia ne put savoir au juste si elle coupait court à la conversation parce que sa question l’avait blessée, ou parce qu’elles arrivaient devant le magasin qui allait selon toute probabilité s’accommoder de leur beurre et de leurs œufs.

« Maintenant, Sylvia, dit Molly, laissez-moi votre panier !… Je ferai votre marché pour le moins aussi bien que vous… Courez chez Foster y choisir, avant qu’il ne fasse nuit, l’étoffe de ce fameux manteau… J’irai vous y rejoindre dans cinq minutes… Il faut nous presser un peu, voilà le soleil qui se couche ! »

Sylvia pencha la tête et s’achemina toute seule, d’un air assez triste, vers le magasin des Foster, situé sur la place du Marché.

III

L’ACHAT D’UN MANTEAU.

Les Foster tenaient à Monkshaven « le magasin » par excellence. C’étaient deux frères, de la secte des quakers, et qui touchaient aux limites de la vieillesse. Leur père avant eux, et le père de leur père avant ce dernier,