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HISTOIRE DU CANADA.

La réponse de la chambre fut simple et respectueuse ; mais le conseil législatif crut devoir lancer un anathème contre la révolution française et remercier la providence d’avoir arraché le Canada des mains d’un pays où il se passait des scènes que l’on pouvait reprocher à des barbares. Ces réflexions, qui pouvaient être bonnes en elles-mêmes, étaient impolies et inopportunes ; elles partaient de trop loin pour atteindre la France, et le moindre bon sens aurait dû faire apercevoir qu’elles ne pouvaient être agréables aux Canadiens, qui devaient conserver des sentimens de respect pour la nation d’où sortaient leurs pères. Aussi cela fut-il regardé comme une petite malice du conseil, qui voulait se donner le plaisir de dire quelque chose de désagréable pour la population.

Après ces préliminaires, les chambres votèrent une adresse au roi pour le remercier de la nouvelle constitution, et se mirent sérieusement à l’ouvrage. La discussion des règlemens pour leur régie intérieure les occupa une grande partie de la session. Elles adoptèrent les règles du parlement impérial avec les modifications nécessitées par la différence de circonstances. Ce travail ramena encore les débats sur l’idiome populaire.

Sur la proposition de dresser les procès-verbaux de l’assemblée dans les deux langues, M. Grant fit une motion d’amendement tendant à les rédiger en anglais seulement avec liberté d’en faire faire des traductions françaises pour les membres qui le désireraient. Après de violens débats, l’amendement fut rejeté. Les discussions recommencèrent lorsque le rapport du comité fut présenté. Grant proposa de nouveau qu’afin de conserver l’unité de la langue légale qu’aucune législature subordonnée n’avait le droit de changer, l’anglais fut déclaré texte parlementaire. M. de Lotbinière prit la parole : « Le plus grand nombre de nos électeurs, dit-il, étant placés dans une situation particulière, nous sommes obligés de nous écarter des règles ordinaires et de réclamer l’usage d’une langue qui n’est pas celle de l’empire, mais aussi équitables envers les autres que nous espérons qu’on le sera envers nous, mêmes nous ne voudrions pas que notre langue vint à bannir celle des autres sujets de sa Majesté. Nous demandons que l’une et l’autre soient permises. Nous demandons que nos procès-verbaux soient écrits dans les deux langues, et que lors-