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HISTOIRE

Le Sauvage qui peignait sa pensée sur l’écorce d’un arbre par une image, employait aussi un style figuré dans la parole. Son intelligence n’était point formée à l’analyse, il avait peu d’idées complexes et de conceptions purement mentales. Il pouvait exprimer par des mots les choses qui tombent sous les sens ; mais il en manquait pour exprimer les opérations de l’esprit. Il n’avait pas de nom pour désigner la justice, la continence ou la gratitude. Cependant les élémens de son idiôme n’attendaient que l’appel de l’esprit, pour lui fournir les expressions dont il pourrait avoir besoin.

Mais si sa langue n’était point surchargée de termes métaphysiques, d’expressiens complexes, elle possédait en revanche un coloris frais et pittoresque avec ces grâces simples et naïves que donne la nature. C’était le pinceau de Rubens, dont les couleurs brillantes et habilement ménagées font oublier les défauts qui peuvent se trouver d’ailleurs dans le tableau. Ses expressions hardies et figurées, et son allure libre et toujours logique, la rendaient très propre à l’éloquence, et aux réparties nobles et incisives à la fois.

Le geste, l’attitude, et l’inflexion de la voix, si naturels chez les Sauvages, donnaient aussi beaucoup de force à l’expression de leurs pensées. Ils employaient les métaphores les plus