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mémoires d’un cambrioleur

aussi dans les gares, à l’heure du départ des trains, mais nous nous écarterions avec prudence de tout véhicule conduit par un cocher rubicond et traîné par une rosse clopinante.

De dix heures du matin à midi, nous errâmes par les rues, l’estomac vide, les jambes molles, et je songeais déjà à vendre le revolver de Manzana, quand mon attention fut attirée soudain par un individu qui marchait devant nous… Il me semblait avoir déjà vu cette « charpente » -là quelque part…

J’allais devancer l’homme afin d’apercevoir son visage quand une occasion s’offrit qui me permit de l’examiner à loisir. Il entra chez un bijoutier et, dès qu’il se présenta de profil, je le reconnus.

C’était l’un des vieux messieurs de la veille.

Ah ! décidément, cette fois encore, le hasard faisait bien les choses !

Le drôle était probablement venu dans cette boutique pour s’assurer, auprès du marchand, que le diamant n’était pas en toc.

— Vite ! dis-je à Manzana… faites comme moi, baissez votre chapeau sur vos yeux… s’il nous reconnaît tout est perdu.

Postés tous deux au coin de la devanture, nous ne perdions pas un des gestes de notre voleur. Nous le vîmes tirer quelque chose de sa poche, le développer et le présenter au bijoutier qui eut une exclamation de surprise. Parbleu ! il n’avait pas souvent vu des diamants comme le Régent. Il le regarda à la loupe, puis le posa sur une petite balance de cuivre, hocha longuement la tête et finalement le rendit au vieux monsieur.

Celui-ci replaça le Régent dans le petit sac que l’on connaît, puis s’entretint un moment avec le bijoutier. Il cherchait évidemment à expliquer comment il se trouvait en possession d’une telle pierre précieuse…

J’eus à ce moment l’idée de faire irruption dans la boutique, en compagnie de Manzana, de me donner