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mémoires d’un cambrioleur

ser pour un hidalgo, baisa galamment la main de la jeune femme et remit sa carte aux deux messieurs, en leur donnant rendez-vous à Monte-Carlo pour le mois suivant.

— Quel bavard vous faites, lui dis-je, lorsque les gêneurs eurent disparu…

— Mon cher, répondit Manzana, un homme du monde comme moi éprouve toujours un véritable plaisir à se retrouver avec des gens de sa condition.

— Merci du compliment, mais permettez-moi de vous dire que ces gens m’ont tout l’air d’affreux rastas… Les deux vieux messieurs, malgré leurs grands airs et leurs gestes arrondis, n’ont rien d’aristocratique… Il suffit de regarder leurs mains et leurs pieds… Quant à la femme, c’est tout simplement une petite grue…

Manzana devint pourpre :

— Une grue ! s’écria-t-il… une grue la senora Mariquita de Rosario !… Vous êtes fou, mon cher… On voit bien que vous n’avez pas souvent fréquenté des femmes du monde…

— Possible ; mais je suis assez physionomiste pour voir tout de suite à qui j’ai affaire… vous vous êtes tout simplement laissé empaumer par des aigrefins… et…

Je n’achevai pas. Une idée m’était soudain venue à l’esprit.

— Et le diamant ? m’écriai-je… vous l’avez toujours, le diamant ?

Manzana eut un sourire méprisant, mais porta malgré tout la main à la poche de son gilet.

— Oh…oooh ! s’écria-t-il… c’est trop fort !… Ils…

Je m’étais précipité sur lui et le secouais par les épaules en hurlant :

— Ils vous l’ont pris, n’est-ce pas ?… Nous sommes refaits !… vous vous êtes peut-être entendu avec eux, misérable !… Vite ! vite ! lançons-nous à la poursuite de ces bandits et je vous promets bien que si nous ne les retrouvons pas vous aurez affaire à moi… triple idiot ! crétin ! rastaquouère !