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retiré des affaires

zana était maintenant mon prisonnier et c’est ce qui le mettait en rage.

Avouez que cet homme était réellement trop exigeant.

Heureusement que le hasard se charge toujours d’arranger les choses.

Comme nous longions la rue de Londres, Manzana me dit tout à coup :

— Au fait, pourquoi me conduisez-vous à la gare Saint-Lazare… c’est généralement par la gare du Nord que l’on se rend en Angleterre… Par Calais, le voyage est bien plus court…

— Évidemment, mais il est aussi moins sûr… Tous les malfaiteurs qui s’enfuient en Angleterre passent généralement par Calais, aussi cette ligne est-elle étroitement surveillée… Si j’étais seul, comme je n’ai rien à redouter, je partirais par le Nord, mais avec vous…

— Oui… vous êtes un petit Saint Jean et moi une affreuse canaille…

— Je ne vous l’aurais pas dit…

— Mais vous le pensez… c’est tout comme…

— Franchement, mon cher, que voulez-vous que je pense de vous après la petite scène des Champs-Élysées ?… Et puis, ne m’avez-vous pas dit que vous vous attendiez à être arrêté ?… Si vous croyez que cela m’amuse de voyager en compagnie d’un individu aussi compromettant que vous…

Manzana ne releva pas cette dernière phrase. Il se contenta de marmonner quelques injures. Je compris cependant que j’avais été un peu loin, aussi cherchai-je immédiatement à atténuer le mauvais effet produit par mes blessantes allusions :

— C’est votre faute, mon cher, si nous arrivons à nous dire des choses désagréables. Vous êtes, depuis quelques heures, d’une humeur de dogue…

— Ah ! vous trouvez ?

— Certes… et j’avoue que je ne m’explique pas ce brusque revirement de votre part. Je ne vous ai rien fait,