à moitié, mais on se réveillait toujours dès qu’on parlait du Korrigan.
— Hé ! railla Bartissol, qu’est-ce que c’est que ça, le Korrigan ?
— C’est comme qui dirait une sorte de loup-garou…
— En as-tu vu ?
— Moi… non, mais il y a des gens qui en ont vu.
— Et à quoi cela ressemble-t-il ?… à une bête ?
— Non… Ce serait plutôt un homme… certains croient que c’est un damné… un mort qui revient, comprends-tu ?
— Eh bien ! vous êtes gais là-bas, en Bretagne… Chez nous, à Pézenas, on réveillonne aussi, mais on chante et on boit, Bou Diou ! et les garçons dansent avec les filles… ça, c’est s’amuser, quoi !… Enfin, bref, quelle figure a-t-il, ton Korrigan ?
— Cela dépend… Quelquefois, on ne voit que deux yeux…
— Hein ? deux yeux, sans corps ?
— Il paraît… Deux yeux qui brillent dans la nuit et qui se mettent à vous poursuivre… D’autres fois, cela vous saisit brusquement par derrière… vous renverse, et il y a des malheureux que l’on a trouvés morts, la figure déchirée… le ventre ouvert…
— Brrr !…
L’homme du Midi tortilla sa longue moustache d’un geste vainqueur d’ancien dragon et se mit à rire doucement. Il n’était pas de ceux qui croient aux Korrigans ni aux contes de bonne femme.
Le petit Logarec, ancien quartier-maître de la flotte, se réservait et n’en pensait pas moins.
Cependant, les deux gardiens tombèrent d’accord sur ce point qu’il était abusif, à l’heure où tous les vivants s’amusent, de condamner deux fonctionnaires à garder trois ou quatre personnages, défunts depuis des siècles.
— Que l’on veille sur les diamants, dit Bartissol, je comprends ; sur les tableaux, passe encore, mais suppo-