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retiré des affaires

— Je croyais… balbutia-t-il.

— Avouez, lui dis-je en riant, que dans notre association, je joue un rôle plutôt ridicule… Je vous « procure » un diamant qui doit vous assurer la fortune et je suis encore obligé de subvenir à tous les frais. Vous ne trouverez pas souvent, cher ami, un garçon aussi complaisant que moi…

— N’était-ce pas convenu ainsi ?

— Oui, je ne dis pas, mais permettez-moi de m’étonner que vous ayez encore la prétention de renouveler votre garde-robe avec l’argent de notre voyage… Pourquoi ne voulez-vous pas rentrer chez vous pour y prendre ce qui vous est nécessaire ?…

— Je ne veux pas rentrer chez moi parce que je crains de me faire arrêter…

— Mauvaise excuse, mon cher Manzana, mauvaise excuse !… Si l’on doit vous arrêter, vous le serez plutôt à la gare que boulevard de Courcelles.

— C’est possible… mais je vous le répète, je ne retournerai pas à mon appartement.

— Libre à vous, mais, en ce cas, ne comptez point sur moi pour vous acheter même une chemise…

— Tant pis ! je m’arrangerai comme je pourrai.

Je vis bien qu’il était inutile d’insister. Manzana refusait de remettre les pieds boulevard de Courcelles, parce qu’il voulait éviter un petit drame dans lequel, cette fois, il n’aurait pas le premier rôle. Il se doutait bien que c’était moi qui avais pris son browning et il craignait que je ne me fisse rendre le diamant, en usant de l’argument péremptoire qu’il avait employé avec moi.

Je réglai la note qui se montait à dix-neuf francs cinquante et demandai au garçon l’indicateur des chemins de fer.

À ce moment, Manzana voulut s’absenter.

— Un instant, dit-il, et je reviens…

— Pas du tout, lui dis-je… je vous accompagne…