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mémoires d’un cambrioleur

— Mon cher Pipe, nous allons descendre… Vous avez bien quelque argent sur vous ?…

Je sortis mon portemonnaie.

— Voici, dis-je, toute ma fortune…

Et j’étalai sur la table ce qui me restait…

D’un rapide coup d’œil, mon compagnon évalua la somme :

— Trente-deux francs cinquante, dit-il… c’est maigre… Enfin, avec cela, nous irons toujours jusqu’à demain…

Il prit son revolver, le glissa dans la poche de son pardessus, s’assura que le coffre-fort était bien fermé, puis me poussa vers la porte en disant :

— Allons manger un morceau, je meurs de faim…

Comme nous descendions, un homme montait les marches quatre à quatre, avec une petite bouteille dans chaque main.

C’était cet idiot d’Alcide.

En m’apercevant, il demeura bouche bée.

— Comment ! c’est vous, bégaya-t-il.

— Vous voyez…

— Vous m’avez salement lâché, hier soir…

— Excusez-moi, mon bon Alcide, mais je me suis senti subitement indisposé…

— La grippe, sans doute ?… Tout le monde a la grippe. Figurez-vous que le patron est rentré cette nuit avec une fièvre de cheval… Le médecin dit que c’est grave… et si le vieux s’en tire, il sera sans doute obligé de garder le lit pendant un bon mois… Mais, à propos, c’est moi que vous alliez voir ?

— Non… j’étais venu rendre visite à un ami qui habite cette maison…

Et de la main je désignai Manzana qui se tenait adossé à la rampe.

— Ah ! très bien… je croyais… Je vous quitte, car je suis pressé… le vieux attend après ses médicaments… Fichues, les séances de cinéma !…