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mémoires d’un cambrioleur

— Et qui porterait ces boucles d’oreilles, ces bagues et ces pendentifs ?

— Mais… moi, Edgar… Vous savez bien que j’ai toujours aimé les diamants.

Je regardai ma maîtresse avec sévérité, puis, laissai d’un ton grave tomber ces mots :

— C’est vous, Édith, qui osez dire une chose pareille ?…

Il y eut un silence… Je jouais merveilleusement mon rôle d’honnête homme outragé… Édith baissait la tête, et je voyais sa poitrine se soulever, à petits coups saccadés. Elle pleurait.

— Allons ! lui dis-je en l’embrassant, oublions tout cela… Vous en aurez des bijoux… mais je ne les aurai pas volés… Il y a des diamants qui portent malheur, et le Régent est de ceux-là… Je ne serai vraiment tranquille que lorsque je l’aurai reporté au Louvre…

— Et si l’on vous arrêtait, fit Édith, en me regardant de ses grands yeux humides ?

— Non… je n’ai rien à craindre… j’ai tout prévu.

J’avais tout prévu, en effet, mais l’objection d’Édith venait cependant de me troubler… Toute la nuit, je réfléchis, et pesai, comme on dit, « le pour et le contre »…

M’arrêter le pouvait-on ?

Je ne serais pas assez stupide pour avouer que j’étais le voleur du Régent, et que n’ayant pu le vendre, je venais le restituer à son propriétaire, c’est-à-dire à l’État… J’inventerais une histoire quelconque je ne suis jamais en peine pour inventer et ma démarche me vaudrait certainement les félicitations de l’administration du Musée… Qui sait même si l’on ne m’offrirait pas une récompense… que je refuserais, bien entendu, car lorsque l’on se met à devenir honnête, il faut le demeurer jusqu’au bout…

Le matin, quand je me levai, j’avais préparé le petit discours que je tiendrais au haut fonctionnaire qui voudrait bien me recevoir… J’avais prévu toutes les questions