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retiré des affaires

pour passer à la caisse, et ces messieurs ne sont jamais pressés.

— Inutile de passer à la caisse, Édith… Laissez-leur les quelques francs que vous devez toucher… Nous n’avons plus besoin de cela maintenant.

— Non, Edgar… j’ai travaillé, j’entends être payée. Pourquoi laisser mon argent à ces gens-là ?… Et puis, j’y tiens à cet argent… c’est le dernier que j’aurai gagné de mes mains, je veux le conserver… J’ai idée qu’il me portera bonheur…

— C’est bien… je vous attends.

— Renvoyez votre taxi.

Je me contentai de sourire… Est-ce qu’un millionnaire regarde à quelques misérables francs ?

Édith pénétra dans la maison, s’engagea dans un long couloir… et je suivis un instant sa gracieuse silhouette… Quand je l’eus perdue de vue, je me calai dans la voiture, les pieds sur le strapontin, allumai un cigare et me pris à réfléchir.

Tout jusqu’à présent semblait me favoriser… J’étais riche, j’avais retrouvé ma maîtresse… que pouvais-je désirer de plus ? Mais une ombre passa subitement sur mon bonheur… Je venais de sentir sous ma main le diamant maudit qui avait bouleversé ma vie…

Trois ans et demi s’étaient écoulés depuis la nuit où je l’avais enlevé de sa vitrine… Trois ans et demi !… Aucun journal n’avait, comme je l’ai dit, parlé de ce vol qui était pourtant d’importance… L’administration du musée du Louvre avait dû, cependant, avertir la police… des agents s’étaient évidemment livrés à une enquête qui n’avait pas abouti et l’affaire devait être aujourd’hui classée.

Néanmoins, on pouvait la rouvrir, cette enquête, d’un moment à l’autre, et cela pendant six ans et demi encore… puisqu’en France les vols de ce genre (vols avec effraction) se prescrivent par dix ans. Si Manzana, au cours de l’interrogatoire qu’on lui ferait subir allait parler de