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mémoires d’un cambrioleur

Nous atteignîmes enfin Cadix. Là, le révérend et moi nous nous séparâmes, et je pris aussitôt le train pour Algésiras. Je m’étais renseigné. Mon but était de gagner Gibraltar, et de prendre là le P. E. A. N. O., c’est-à-dire le Péninsulaire Oriental qui devait, en quarante-huit heures, me déposer à Marseille.

Il y a, à Cadix, un petit chemin de fer que l’on appelle la « Tortuga » et qui vous conduit quelquefois à Algésiras… Je dis quelquefois, car il arrive que le train s’arrête en route. Sa machine est très vieille et s’essouffle facilement. Elle a besoin de continuelles réparations, que l’on exécute souvent durant le trajet. Les voyageurs sont alors obligés de descendre, et de camper dans la plaine, en attendant que la « Tortuga » puisse repartir. J’eus la chance de ne pas m’arrêter en route et j’arrivai assez rapidement à Algésiras, ville de douze mille habitants, devant laquelle, en 1801, l’amiral Linois vainquit la flotte anglaise. Une baie sépare Algésiras de Gibraltar, et on la traverse en une demi-heure environ, à bord d’une vedette.

À Gibraltar, je me retrouvais chez moi, c’est-à-dire en Angleterre, et mon orgueil national qui venait d’être un peu humilié à Algésiras s’enflamma de nouveau devant le colossal rocher que nous avons transformé en forteresse, et qui commande l’entrée de la mer méditerranéenne. Pourquoi faut-il, hélas ! que lorsque je me retrouve en territoire anglais, il m’arrive toujours quelque mésaventure ?

À Gibraltar, les difficultés commencèrent.

D’abord, on nous demanda nos papiers, puis les douaniers visitèrent nos valises. J’eus beau affirmer que la mienne ne contenait rien qui fût liable to duty, on me força à l’ouvrir, et l’on s’imagine sans peine la stupéfaction du douanier quand il vit mon matelas de bank-notes. Il appela son chef qui ne fut pas moins étonné que lui, puis me posa quelques questions auxquelles je répondis avec mon aplomb habituel :