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mémoires d’un cambrioleur

une fois raboté à sa base, s’adapterait parfaitement dans l’emplanture de l’ancien, et sous deux jours au plus tard, le Sea-Gull serait en état de reprendre la mer.

Le lendemain (c’était mon tour de sortie), je fis dans une boutique de Santa-Cruz achat d’un revolver d’occasion, puis me rendis sur le quai, à un endroit où l’on procédait au chargement des bananes. Il y avait là deux vapeurs espagnols : la Dona-Isabelle et le Pescador… J’appris par un homme d’équipage, un Anglais comme moi, que ces deux bateaux se rendaient à Cadix, et que l’équipage de l’un, le Pescador, n’était pas au complet. Je me fis présenter au capitaine, un gros homme à la figure couturée de cicatrices, et qui baragouinait un peu d’anglais.

— Il me faut un soutier, un graisseur et un aide-chauffeur, me dit-il.

— Je puis, répondis-je, remplir l’office de soutier…

— Je le pense bien, dit-il en riant… ce n’est pas un métier qui exige un long apprentissage… Nous partons vendredi, c’est-à-dire dans trois jours… Apportez-moi vos papiers au moment de l’appareillage… Soixante-quinze pesetas par semaine… Ça vous va ?

— Oui, capitaine.

— Bien… entendu… Au revoir !…

J’étais « embarqué ». Il ne me restait plus qu’à trouver des papiers, mais j’espérais bien m’en procurer à bord du Sea-Gull. Il me suffirait pour cela d’aller faire une petite « perquisition » dans le gaillard d’avant.

Cette nuit-là, je dormis mal. Le plan que j’allais mettre à exécution était des plus audacieux, et aussi des plus délicats. Il s’agissait de ne rien laisser au hasard. Je répétai mentalement plus de dix fois la scène que j’allais jouer dans quelques heures, car j’avais appris en revenant à bord que le Sea-Gull, complètement réparé, se remettrait en route le lendemain dans l’après midi. À côté de moi, Zanzibar ronflait comme un orgue, et j’enviai la sérénité de ce bon nègre. Moi, j’allais me