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retiré des affaires

capable de rouler certaines gens, mais absolument sans défense lorsqu’il se trouvait en face de quelqu’un qui le dominait. Il était, de plus, dépourvu de sens moral, on en a eu la preuve. Trop lâche pour se débarrasser d’un ennemi, il n’hésitait pas à payer pour le faire supprimer. J’avais éprouvé, je l’avoue, quelque pitié pour lui, en le voyant effaré, larmoyant, tassé dans son fauteuil comme un impotent, mais à présent, il me dégoûtait, et sa vue même m’était odieuse.

Heureusement que j’allais bientôt lui tirer ma révérence.

En attendant que tous mes « préparatifs » fussent terminés, je continuais de le terroriser en lui parlant du passager imaginaire, ce Dickie qui faisait, paraît-il, le déshonneur de la famille Pickmann.

Chaque matin, je lui rendais compte des faits et gestes de Dickie… Tantôt, je l’avais aperçu en ville, tantôt je l’avais surpris rodant dans la coursive d’entrepont.

— Ce misérable, me dit un soir Pickmann, a dû s’entendre avec le capitaine, et lui promettre une forte prime…

— C’est possible, répondis-je…

— Alors, ce Ross serait un affreux gredin… J’ai bien envie de le faire appeler et de lui demander de quel droit il a accepté un étranger sur un bateau qui m’appartient pour deux mois encore…

— Gardez-vous en bien… Si vous voulez tout compromettre, vous n’avez que ça à faire… Au lieu d’avoir un ennemi, vous en aurez deux à bord, et, ma foi, je ne réponds plus de rien…

— Oui, Colombo a raison, intervint Mme Pickmann, ce serait la dernière des gaffes… Laisse donc agir Colombo… C’est un homme intelligent, lui, et qui a de la décision.

Certes, j’avais de la décision, elle allait bientôt s’en apercevoir ! Cependant, il fallait se hâter. Le capitaine Ross avait eu la chance de trouver un mât de goélette qui,