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retiré des affaires

À quoi devais-je attribuer ce silence ? Était-ce un piège ? Espérait-on ainsi donner confiance au voleur et le pincer plus facilement ? Je crois plutôt que l’administration du musée du Louvre, après avoir prévenu la police, avait jugé inutile d’ébruiter un vol qui devait la « gêner » un peu, et qu’en attendant l’arrestation du coupable elle avait remplacé le Régent par un bouchon de carafe quelconque.

Tout en mangeant, Pickmann et sa femme continuaient de bavarder, mais on les sentait inquiets. Je m’efforçai d’ailleurs d’augmenter cette inquiétude. Cela faisait partie du plan que j’avais élaboré… Je dosais mes effets, avec l’habileté d’un Allan Dickson qui s’apprête à confondre un malfaiteur.

— Bah ! qu’avez-vous à craindre, fis-je d’un petit air sournois, vos papiers sont en règle, n’est-ce pas ?

— Oh !… certes… très en règle, bégaya M. Pickmann en devenant rouge comme un piment.

— Alors… tout est pour le mieux…

— D’ailleurs, les douaniers ne nous demanderont pas nos papiers…

— Les douaniers… non, mais les gens de police.

— Les gens de police ! Ont-ils le droit de pénétrer ici ?

— Pourquoi pas ?

Pickmann sursauta :

— Mais je ne suis pas un malfaiteur ! s’écria-t-il… je…

— Voyons, calmez-vous… y a-t-il là de quoi se monter ?… Vous êtes un honnête homme, vous avez des papiers… Que pouvez-vous craindre ?

— Rien… rien, assurément… Mais je me rappelle maintenant que je n’ai pas fait viser nos passeports…

— On ne les examinera pas à la loupe. Il suffira de les présenter, et si on s’apercevait, par hasard, qu’ils n’ont pas été timbrés au départ, vous diriez qu’en Angleterre certains personnages connus sont dispensés de cette formalité… Est-ce que vous croyez que M. Lloyd George