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retiré des affaires

— Oh ! soupira-t-il… un banjo !

Et il sauta de son lit pour venir m’embrasser les mains. Il fallut que je lui expliquasse comment je le fabriquerais ce banjo, avec quoi, et c’est seulement quand j’eus satisfait sa curiosité qu’il consentit à se recoucher.

Pauvre garçon ! Sa vie n’était pas compliquée à celui-là… Pourvu qu’il eût une « misique » et qu’on ne lui donnât pas de coups de corde, il était heureux comme un roi.

Pendant qu’il reposait en rêvant sans doute de banjo, moi dont la tête était bourrée de projets, j’étais plongé dans de ténébreuses méditations.

Soudain, une idée me vint à l’esprit et je résolus immédiatement de la mettre à exécution.

Je me levai, ouvris sans bruit la porte de la chambre et, pieds nus, me glissai dans la coursive. Arrivé devant la cloison de pitchpin derrière laquelle je savais que se trouvait le lit de Pickmann, je donnai deux grands coups de poing dans le panneau…

— Qu’y a-t-il ?… qu’y a-t-il ? demanda Pickmann réveillé en sursaut.

Alors, collant ma bouche contre le bois, je prononçai d’une voix nasillarde :

— Richard Stone !…

— Qui m’appelle ? bégaya Pickmann encore à moitié endormi.

— Richard Stone ! répétai-je en haussant le ton… m’entendez-vous ?

Cette fois, Pickmann ne répondit pas.

Le coup était porté. Je regagnai ma chambre à pas de loup et me remis au lit.

J’étais sûr maintenant que Richard Stone, le voleur de la Banque d’Angleterre, habitait bien dans la peau de Pickmann. En répondant « qui m’appelle ? » le misérable s’était trahi. Il s’était ensuite ressaisi, mais trop tard. Je m’étais donc assuré de la véritable identité du per-