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mémoires d’un cambrioleur

J’avais bien affaire à deux filous cherchant — assez maladroitement d’ailleurs — à dépister la police.

— Vraiment ! s’écria Mme Pickmann qui ne pouvait tenir sa langue, ce n’était pas la peine de payer si cher la location de ce maudit yacht…

— Serait-il indiscret, dis-je, de vous demander combien vous avez loué ce bateau ?

— Un prix fou, monsieur… un prix fou… tenez, vous ne devineriez jamais…

— Cinq mille livres ?

— Ah ! vous n’y êtes pas… Quinze mille, monsieur… oui, quinze mille… pour deux mois…

— C’est un peu cher, en effet…

— Parbleu, mon mari s’est fait rouler… Si encore pour ce prix, nous étions dispensés de toutes les formalités de douane et de police.

— N’y comptez pas…

— Cependant, si nous nous faisions débarquer dans quelque petit port ?…

— Vous auriez encore plus d’ennuis…

Il y eut un silence.

Ce fut M. Pickmann qui reprit :

— Écoutez, Colombo, vous m’avez l’air d’un brave garçon… vous avez pu constater que nous sommes pour vous des amis… que nous vous traitons en camarade…

— Et je vous en sais gré, répondis-je…

— Eh bien ! donnez-nous un conseil… Vous êtes très au courant, en votre qualité de marin, des différents usages de la navigation… Comment pourrions-nous débarquer sans être importunés par les douaniers, les officiers de port et les inspecteurs de police ?… Cela va vous paraître bizarre, mais je suis d’une nervosité telle que je ne puis me soumettre, sans devenir fou furieux, à toutes les chinoiseries administratives auxquelles sont astreints les voyageurs ordinaires… C’est stupide, direz-vous, mais on ne se refait pas…

Je pris un air grave et parus réfléchir longuement…