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retiré des affaires

schnick pour nous coucher par terre… oui, deux pintes et y en avait même qui allaient jusqu’à trois… Décidément, il n’y a plus d’hommes aujourd’hui… Enfin, ça n’est pas tout ça… vous n’avez pas de papiers… pas même un simple certificat… Sur un navire de commerce, on vous ferait arrêter, mais moi, je m’en moque… Ce ne sont pas les papiers qui font les bons marins. Si je vous ai demandé les vôtres, c’était pour la forme… Ici, à mon bord, personne n’a de papiers… Je ne sais même pas le nom de mes hommes… Ils se présentent, je les accepte, et les baptise aussitôt… Passons aux conditions. Nous allons aux Indes… c’est vingt-cinq livres pour la traversée… autant pour le retour… ça vous va ?

— Oui, capitaine.

— Bon… maintenant, on ne descend pas à terre aux escales…

— Cela m’est égal.

— La discipline ici est très sévère… Comme je suis le maître, le seul maître, entendez-vous, à bord du Sea-Gull, j’ai tenu à y maintenir les anciennes traditions de la marine à voiles… Je vous donnerai d’ailleurs une copie du règlement. Donc, nous sommes d’accord, n’est-ce pas ?

— Oui, capitaine.

— Eh bien, vous êtes des nôtres… à partir d’aujourd’hui, vous vous appelez « Colombo »… chaque marin du Sea-Gull porte le nom d’une ville maritime… Venez, je vais vous présenter à Cardiff, le maître d’équipage.

Le capitaine s’engagea dans une écoutille et je descendis derrière lui. Nous suivîmes la coursive d’entrepont et arrivâmes dans une petite pièce carrée qui prenait jour par un hublot.

Un homme gigantesque, assis sur une caisse, se dressa à demi, dès que nous pénétrâmes dans la chambre. C’était Cardiff. Jamais de ma vie je n’ai vu pareil colosse. Je ne puis mieux comparer Cardiff qu’à un gorille du Gabon. Sa tête énorme, au front bas, ses yeux gris mobiles et