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mémoires d’un cambrioleur

À la gare, dès que j’eus pris mon billet, un employé m’invita poliment à ne pas stationner dans la salle d’attente, et comme je m’étais réfugié sur le trottoir, un policeman m’ordonna de descendre sur la chaussée.

Un autre détenu qui avait été libéré en même temps que moi arpentait librement, la pipe à la bouche, la cour de la gare, et personne ne faisait attention à lui. Cela m’étonna tout d’abord, mais je finis par comprendre…

Cet homme portait un costume d’ouvrier, et il y en avait vingt comme lui qui attendaient le train… Rien ne le différenciait de ceux qui l’entouraient et il avait l’air d’être de leur compagnie, tandis que moi, avec ma pelisse sous le bras, ma jaquette chiffonnée, mon chapeau déformé, ma chemise fripée qui, faute de doubles boutons, bâillait sur la poitrine, j’attirais immédiatement l’attention des passants.

Des centaines d’yeux étaient braqués sur moi et je sentais le rouge de la honte me monter à la face.

Si jamais j’ai désiré voir la nuit arriver, ce fut bien ce jour-là !…

Ce jour-là aussi je pus mesurer la profondeur de la muflerie humaine !…