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mémoires d’un cambrioleur

J’avais eu la chance, en opérant mes sauvetages, de ne pas perdre mon diamant… Je le sentais toujours sur mon abdomen… je le sentais d’autant plus qu’il s’était, sous l’effort que j’avais déployé, profondément enfoncé dans ma chair où il avait même, par endroits, produit de légères érosions.

Je m’apprêtais à prendre la file, à la suite de mes compagnons que l’on allait reconduire dans leurs cellules quand le directeur me fit appeler, ainsi que les deux autres détenus qui s’étaient en même temps que moi distingués par leur courage.

Il nous félicita et eut même quelques paroles émues assez « réussies », mais ce fut moi qui recueillis la plus grande part de cette gerbe d’éloges :

— Numéro trente-trois, me dit-il, vous venez, en quelques minutes, de racheter un passé regrettable et je ne veux plus voir en vous qu’un héroïque et brave garçon… Dès aujourd’hui, je vais rendre compte de votre belle conduite au lord Chief of Justice et je ne doute pas qu’il ne vous accorde à bref délai une sérieuse réduction de peine… et peut-être votre grâce… Allez !… Ayez confiance ! Pour vous l’heure de la libération est proche. »

Et, chose stupéfiante, inouïe, inimaginable, le directeur de la prison de Reading serra la main au numéro trente-trois…

C’était la première fois qu’on voyait chose pareille, et les gardiens, quand je passai devant eux, me saluèrent militairement.

Au déjeuner, j’eus double ration avec une pinte de pale-ale et une tasse de thé ; au dîner, on me servit une excellente oxtail soup, du roatsbeef avec des pickles, un pudding et du stout… et je recommençai à trouver la vie agréable.

De Tread-Mill, il n’en fut plus question, d’abord parce que le moulin ne fonctionnait plus, ensuite parce que j’étais en instance de libération et que, comme tel, je devais être dispensé de tout travail.