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retiré des affaires

pu se dispenser d’ajouter cette note lugubre à tout leur arsenal de torture.

Pour le prisonnier, l’heure qui sonne est une distraction… elle apporte aussi avec elle un espoir… Une de moins !… songe le malheureux détenu ! Et cette fuite du temps, trop lente à son gré, lui semble malgré tout bien douce, puisqu’elle le rapproche insensiblement du jour où il quittera sa défroque de clown pour retourner parmi les vivants.

Pourquoi faut-il qu’un horrible carillon vienne, toutes les soixante minutes, égrener ses tintements sinistres comme pour dire au prisonnier avec une cruelle ironie : « Tu peux compter les heures, va, mais il en est une que, bientôt, tu entendras pour la dernière fois. »

La loi anglaise est bien dure pour ceux qu’elle frappe, et il ne serait pas trop tôt qu’elle s’humanisât un peu et marchât avec le progrès… Je crois que cela arrivera lorsque les juges renonceront enfin à siéger en perruque poudrée et remiseront parmi les curiosités des siècles défunts leurs oripeaux ridicules.

Y renonceront-ils jamais ?

Le code britannique aurait certes besoin d’être remanié, car il retarde vraiment trop. Au moment où, dans le monde entier, tout est en marche vers un système social plus en rapport avec les mœurs actuelles, où chez tous les peuples les lois ont été « retouchées », pourquoi l’Angleterre continue-t-elle à marquer le pas avec tant d’indolence ?…

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Le nouveau régime auquel j’avais été soumis, grâce au docteur Murderer, apaisa un peu mes nerfs ; les tremblements qui m’agitaient devinrent moins violents, mais les étourdissements persistèrent, et c’étaient eux qui m’inquiétaient le plus, car je craignais qu’ils ne me prissent au moment où je serais en train de tourner le « moulin ». De plus, je faisais de la neurasthénie, ce qui n’a rien d’étonnant avec un régime pareil, et la confiance que j’avais eue en l’avenir m’abandonnait peu à peu…