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mémoires d’un cambrioleur

ries célèbres, celles qu’ont portées les rois, me semblaient répondre à mon dessein.

Pour quelle raison, alors, suis-je venu en France ?

Sans doute, nous avons des diamants, de célèbres diamants comme ceux de la couronne d’Angleterre, par exemple ; mais, je le déclarerai tout net : ils sont mieux gardés que chez vous. La France apparaît aux étrangers comme un vrai pays de cocagne, et cela est particulièrement vrai pour les gentlemen qui s’adonnent au cambriolage.

Ici, point de ces promiscuités fâcheuses avec des surveillants d’éducation précaire… on n’est jamais obligé de se colleter avec des malappris… Tout vous est largement ouvert… On est chez soi… Il n’y a qu’à se baisser pour prendre, si le cœur vous en dit.

La France est, avant tout, le pays du savoir-vivre.

Autre motif : si l’on est pris — car il faut tout prévoir — si l’on est pris, cela devient sérieux en Angleterre et désobligeant au possible : dix ans de hard labour pour la moindre des peccadilles, autant dire la mort civile et naturelle par surcroît.

Inversement, que risque-t-on chez vous ? Cinq ans, dix ans de villégiature qu’on n’aurait jamais songé à s’offrir ; un voyage au long cours dans des régions clémentes, au climat sain et tempéré, sous des cieux toujours bleus, au milieu de décors féeriques.

On s’évade facilement de ces régions-là… et l’on peut, au retour, se refaire une situation. On a acquis de l’expérience et la considération qui entoure généralement les voyageurs.

Voilà pourquoi j’ai choisi la France… Résolu à commettre un vol qui en valût la peine, je décidai de m’emparer du Régent.

Pour mener mon projet à bien, je choisis le jour de Noël, qui est d’heureux augure en Angleterre et, dans l’après-midi du 24 décembre, je me mêlai aux nombreux curieux qui s’écrasaient dans les galeries du Louvre.