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mémoires d’un cambrioleur

rable. Au rayon de la bijouterie, je choisis un superbe chronomètre en or avec une chaîne de même métal et passai à mes doigts quatre ou cinq bagues qui me parurent d’un bon poids. Pendant que j’y étais, je fis aussi ample provision de bijoux de femme… Je ne savais pas, à ce moment, si je reverrais jamais Édith, mais si ce bonheur m’était refusé, je ferais facilement accepter à une remplaçante cette orfèvrerie de luxe.

Mes « emplettes » terminées, je me blottis sous un comptoir et attendis le jour.

Quelques veilleurs de nuit se montrèrent bientôt et je les entendis, pendant près de vingt minutes, ouvrir et refermer les « boîtes de ronde ».

Dix minutes plus tôt, je me serais sans doute fait prendre, mais j’avais eu la chance de pénétrer dans le magasin au moment où les hommes de garde venaient justement de finir leur tournée.

Je n’avais plus qu’une inquiétude. Parviendrais-je sans être remarqué à sortir de la maison Robinson and Co ?

À l’heure de l’ouverture des magasins, les employés se précipiteraient en foule dans les différents rayons… Comment les éviter ?

Je songeai à descendre dans les sous-sols, mais à la réflexion, je compris que cela ne m’avancerait à rien. On me découvrirait aussi bien en bas qu’en haut. Le plus simple était de me dissimuler sous un comptoir, le plus près possible de la porte, et c’est ce que je fis.

Dieu que cette nuit me parut longue !

Enfin le jour parut, un jour terne et triste d’hiver. Le magasin fut éclairé d’une lueur grise et froide qui filtrait à travers les stores, puis, dans la rue, les voitures des laitiers commencèrent à rouler…

Bientôt, des garçons se mirent en devoir d’enlever les housses qui recouvraient les vitrines et les comptoirs, pendant que d’autres roulaient de petits chariots qui faisaient un vacarme de tous les diables… Là-bas, dans la lumière plus vive d’un hall vitré, je distinguais