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retiré des affaires

voir un gentleman comme moi en compagnie d’un individu d’aspect aussi minable que Manzana…

— Voyez, dis-je, quand l’agent se fut éloigné, un peu plus, vous vous faisiez arrêter…

— Possible… Je m’en moque, mais j’espère bien que l’on vous eût arrêté avec moi… et alors…

— Alors ?…

— J’aurais dit…

— Vous n’auriez rien dit du tout, car si vous croyez me tenir, je vous tiens aussi… Je ne suis pas un assassin, moi.

— Un assassin !… un assassin !… il faudrait le prouver…

— Ce sera très facile.

— Ah ! vraiment ? fit Manzana, d’une voix sourde.

— Oui… très facile… vous savez la dame de l’avenue des Champs-Élysées… eh bien, elle est ici… je l’ai rencontrée hier…

— Vous cherchez à m’intimider, mais ça ne prend pas, mon cher.

— Voulez-vous que je vous conduise chez elle ?

Manzana me regarda fixement. Nous étions arrivés à Regent’s Street. Les candélabres électriques placés au milieu de la chaussée nous inondaient de leur clarté bleue.

— Eh bien, oui, articula mon associé d’un ton sec… oui… j’accepte… conduisez-moi chez elle…

— Vous le voulez ?

— Je l’exige… même.

— C’est bien, suivez-moi… quoiqu’il soit déjà tard, je suis sûr que son secrétaire ne demandera pas mieux que de vous recevoir…

— Son… secrétaire ?

— Oui…

Manzana semblait avoir perdu de son assurance.

Il faut croire que, tout en bluffant, j’avais touché juste.