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mémoires d’un cambrioleur

— J’étais, au contraire, certain de vous revoir… Vous saviez que le Good Star allait à Londres… si j’avais voulu vous plaquer, comme vous dites, je ne serais pas venu en Angleterre…

Manzana ne trouva rien à répondre à ce dernier argument. Je voyais qu’il était furieux.

Tout à coup il éclata :

— Oui… oui… hurla-t-il, tout cela c’est très joli… c’est moi qui ai tort, c’est entendu… En attendant, vous vous payez des dîners de plusieurs livres dans les plus grands hôtels, vous avez des maîtresses, vous ne vous déplacez plus qu’en taxi… Et moi… moi, votre associé, j’en suis réduit à ouvrir les portières pour gagner quelques pence… Tel que vous me voyez, voilà deux jours que je me nourris de croûtes de pain…

— Si une livre peut vous obliger…

— Je ne demande pas l’aumône, répliqua Manzana d’un air digne… J’entends que vous respectiez nos conventions… Jusqu’à ce que nous ayons pu vendre notre diamant (et le drôle appuya sur ce mot) nous devons faire bourse commune… Tout ce qui est à vous m’appartient…

— Même ma maîtresse ?

— Pourquoi pas ?

— Vraiment, mon cher, vous allez un peu fort… D’ailleurs, je vais vous apprendre une chose qui va singulièrement vous refroidir… Je n’ai plus le diamant…

— Quoi ?… qu’est-ce que vous dites ?… Vous n’avez plus le diamant ?… Vous… n’avez plus le diamant. Alors vous l’avez vendu, vendu à vil prix ! Eh ! parbleu, ça n’est pas étonnant… J’aurais dû m’en douter du premier coup… vous êtes un gredin… un ignoble individu… un…

Manzana n’acheva pas.

Un policeman s’était approché, attiré par le bruit de la dispute.

Comme nous passions à ce moment sous un bec de gaz, il nous dévisagea tous deux et parut fort étonné de