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retiré des affaires

gilet ou dans la ceinture de mon pantalon, mais j’y renonçai… la doublure pouvait se déchirer, s’user au frottement, et je risquais de perdre mon trésor.

Je songeai aussi à le dissimuler, dans notre chambre, sous une lame de parquet, à l’introduire entre deux briques de la cheminée ou à le loger tout en haut de l’armoire à glace, mais je reconnus que ces cachettes n’offraient aucune sécurité. Une bonne de l’hôtel pouvait le découvrir, et il était à présumer qu’elle ne m’aviserait point de sa trouvaille.

Et pourtant, il fallait le dissimuler, coûte que coûte.

Le lecteur s’étonnera sans doute de ce surcroît de précautions et se demandera probablement pourquoi je n’avais point jugé à propos de tout révéler à Édith.

Hélas ! l’expérience m’a appris que les femmes sont incapables de garder un secret. De plus, je ne pouvais avouer à ma maîtresse, qui me croyait un gentleman, que je n’étais qu’un vulgaire cambrioleur.

Édith avait des principes. Elle se disait la nièce d’un pasteur, et bien qu’elle eût suivi une voie que la morale réprouve, elle n’en demeurait pas moins très « honnête » — au sens large du mot. Elle n’admettait point que l’homme qui doit, en toute chose, donner l’exemple à la femme, pût se laisser aller à commettre une mauvaise action, même pour conquérir la fortune.

Je suis certain que si à cette époque Édith avait su quel genre d’individu j’étais, elle m’eût immédiatement dénoncé à la police.

Plus tard, elle en arriva heureusement à changer d’avis, mais n’anticipons pas !… Il y avait là, n’est-il pas vrai ? un curieux cas psychologique, une mauvaise interprétation des conventions sociales, mais le rigorisme ridicule de cette petite perruche est commun à nombre d’Anglaises.

En France, j’en ai fait la remarque, les femmes sont beaucoup plus indulgentes, et aussi plus justes. Si elles aiment un cambrioleur, elles arrivent assez facilement à