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mémoires d’un cambrioleur

nous mettre à l’abri dans un baraque en planches qui servait de bureau à une compagnie de navigation.

Manzana ignorait toujours ce que j’avais l’intention de faire, mais il n’osait m’interroger, de peur de se faire encore rembarrer.

De temps à autre, il me jetait un regard à la dérobée, mais je demeurais impassible, jugeant inutile de le mettre au courant de mes projets.

Enfin, comme la pluie avait cessé, je lui touchai légèrement le bras :

— Venez, lui dis-je.

— Où cela ?

— À deux pas d’ici.

Quelques minutes après, je m’arrêtais devant un grand cargo amarré à quai et dans lequel des hommes étaient en train d’empiler à fond de cale des balles de coton.

Ce cargo était anglais ; il s’appelait le Good Star, ce qui signifie Bonne Étoile.

Ce nom me plaisait car, on a pu le voir, je suis assez superstitieux et m’imagine à tort ou à raison que certains noms doivent avoir sur notre destinée une réelle influence.

M’approchant d’un gros homme à casquette galonnée, qui surveillait l’embarquement des marchandises, je lui dis en anglais :

— Pardon, capitaine, n’auriez-vous point besoin, par hasard, de deux hommes de peine ?…

Le capitaine me toisa pendant quelques secondes, puis après avoir tiré deux ou trois bouffées de sa courte pipe en merisier, répondit d’un ton brusque :

— Qu’est-ce que vous savez faire ?

— Oh ! beaucoup de choses, captain

— Savez-vous arrimer une cargaison ?

— Oui, captain

— Pouvez-vous aussi tenir convenablement la barre ?

— Je le crois.

— Savez-vous lover chaînes et filins ?