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retiré des affaires

— Vous pensez à tout, mon cher Pipe ! s’exclama mon associé… mais, dites donc, avez-vous songé à notre arrivée au Havre ? Il y aura de la police, là-bas, et pour peu que nous ayons été signalés…

— J’ai prévu cela, mon cher, aussi descendrons-nous à la première gare avant Le Havre… D’ailleurs, je réfléchis, il est possible que nous ne prenions pas le train…

— Ah !… vous songeriez à louer une auto ?

— Non… Je vous dirai cela tout à l’heure… j’ai besoin de me renseigner…

— Faites-le vite, alors, car je ne me sens pas en sûreté.

— Et moi donc ? J’ai hâte de filer, croyez-le… nous commençons à connaître trop de monde ici : le cocher, la débitante, le pasteur, le commissaire de police…

Nous nous apprêtions à sortir, quand je fis remarquer à Manzana qu’il serait peut-être prudent de lire un peu les journaux.

Il approuva cette idée et nous envoyâmes chercher, par le groom à grosse tête, le Fanal de Rouen. J’étais curieux de savoir si cette feuille parlait de notre petite expédition de la veille. Je ne tardai pas à être fixé, mais ce que je lus me plongea dans un abîme d’étonnement.

— Écoutez, dis-je à Manzana.

Sous le titre « Le Mystère de l’hôtel d’Albion », on racontait ce qui suit :

« Hier, dans notre ville d’ordinaire si paisible, depuis que les nombreux indésirables qui l’habitaient se sont réfugiés au Havre, un drame mystérieux s’est déroulé à l’Hôtel d’Albion, où l’on a découvert, dans la chambre no 34, un homme et une femme bâillonnés et ligotés, à n’en pas douter, par des mains expertes… »

Je regardai Manzana :

— Voilà, dis-je, un compliment à votre adresse…

— Oui… oui… continuez, fit mon associé d’un ton bourru.