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mémoires d’un cambrioleur

rejaillira quand même quelque chose sur moi et le Fanal de Rouen qui, depuis quelques mois, mène contre moi une odieuse campagne sous prétexte que je n’opère jamais d’arrestations, sera bien obligé de reconnaître que, le cas échéant, je n’hésite pas à payer de ma personne et à empoigner les malfaiteurs au collet.

Le commissaire avait prononcé ces derniers mots d’un ton confidentiel, et il y avait dans son regard une sorte de supplication.

Pour ce brave fonctionnaire en butte aux mesquines tracasseries de province, j’étais le Deus ex machina, celui sur qui il comptait pour relever son prestige aux yeux de ses chefs.

Avouez qu’il y a tout de même de curieuses coïncidences !

Il me remit sa carte, puis, après m’avoir serré la main :

— À bientôt, me dit-il… il faut que je continue ma petite visite domiciliaire… Je ne sais pourquoi, j’ai reçu brusquement l’ordre d’opérer une descente dans tous les hôtels borgnes de mon district et il paraît que mes collègues accomplissent, en ce moment, la même mission… Je crois savoir que l’on tient à pincer des escarpes dangereux qui ont fait, hier, un mauvais coup dans la ville… Voyez-vous que l’on aille justement arrêter vos « gredins » et vous couper l’herbe sous le pied… ça serait une sale blague, hein ?

— Non… il n’y a pas de danger, mes gredins ne logent pas dans un hôtel borgne.

— C’est juste… Des gens qui ont des millions en poche !… Allons, au revoir, mon cher monsieur Bonneuil !… N’oubliez pas la promesse que vous m’avez faite et… excusez-moi d’avoir si brusquement interrompu votre sommeil…

— Oh !… dans notre métier, ne sommes-nous pas habitués à ces petites surprises !