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nous en aurons à combattre plus tard. Si la rivière est balayée, tournez-vous de mon côté, nous allons avoir de la besogne. »

Dispersés dans la plaine, cherchant partout les deux ennemis qu’ils avaient vus disparaître, les Indiens s’avançaient vers le fossé qui abritait les deux chasseurs. Ceux-ci voyaient les uns battre les buissons, les autres, à cheval, fouiller les herbes avec leurs longues lances, et tous s’approchant avec précaution.

« Démontons les cavaliers de préférence, c’est plus sûr, dit le Canadien, et feu tous deux, nous n’aurons plus le temps de recharger. Y êtes-vous ?

– Oui, vous à droite ; la gauche me regarde. »

Deux éclairs jaillissant du milieu des herbes précédèrent deux explosions presque confondues en une seule, et deux cavaliers tombèrent encore à bas de cheval.

Bois-Rosé et l’Espagnol avaient à peine eu le temps de se baisser derrière le talus de leur fossé, qu’une décharge de balles vint les couvrir de terre, et que des flèches s’enfoncèrent en sifflant tout près d’eux.

« Alerte, dit l’Espagnol, c’est le moment. »

Il parlait encore que déjà il s’était élancé de son trou, accompagné de Bois-Rosé. Bientôt aperçus, les ennemis bondirent après eux, le couteau et le casse-tête à la main. Gayferos, Rayon-Brûlant et ses deux Indiens, accroupis derrière le canot, nourrissaient, contre ceux qui étaient cachés sous les saules de l’autre rive, un feu suivi qui les inquiétait.

Ces décharges répétées coup sur coup, les hurlements que poussaient sans interruption les Comanches, en faisant croire aux Apaches de la plaine à la présence de nombreux combattants contre lesquels ils avaient à lutter, les firent hésiter un moment dans leur poursuite. Ce moment d’hésitation servit heureusement les deux fugitifs, qui, protégés par le feu de Rayon-Brûlant et