Dans son brusque mouvement, ses beaux cheveux noirs s’étaient à demi-dénoués, le sang affluait à ses joues, ses yeux d’un bleu sombre lançaient des flammes ; et la douleur, la colère, l’horreur de l’humiliation, donnaient à son visage une expression sublime.
Elle était si belle que Martial en fut remué.
— Admirable !… murmura-t-il en anglais, belle comme l’ange de l’insurrection.
Cette phrase, qu’elle comprit, interrompit Marie-Anne. Mais elle en avait dit assez, son père se sentit vengé.
Il tira de sa poche un rouleau de papiers, et le jetant sur la table :
— Voici vos titres, dit-il au duc, d’un ton où éclatait une haine implacable, gardez le legs que me fit votre tante, je ne veux rien de vous… Je ne remettrai plus les pieds à Sairmeuse… Misérable j’y suis entré, misérable j’en sors…
Il quitta le salon la tête haute, et une fois dehors, il ne dit à sa fille qu’un seul mot :
— Eh bien !…
— Vous avez fait votre devoir ; répondit-elle, c’est ceux qui ne le font pas qui sont à plaindre !…
Elle n’en put dire davantage, Martial accourait, ne songeant qu’à se ménager une occasion de revoir cette jeune fille dont la beauté l’avait si fortement impressionné.
— Je me suis esquivé, dit-il en s’adressant plutôt à Marie-Anne qu’à M. Lacheneur, pour vous rassurer… Tout s’arrangera, mademoiselle, des yeux si beaux ne doivent pas verser de larmes… Je serai votre avocat près de mon père…
— Mlle Lacheneur n’a pas besoin d’avocat, interrompit une voix rude.
Martial se retourna et se trouva en présence de ce jeune homme qui, le matin, était allé prévenir M. Lacheneur.
— Je suis le marquis de Sairmeuse, lui dit-il, du ton le plus impertinent.