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« Je connais la retraite de Lacheneur, et prie Monseigneur d’ordonner que quelques soldats à cheval m’accompagnent pour le saisir.

CHUPIN. »

Ce billet fut remis à un homme de garde avec prière de le porter au duc de Sairmeuse, qui présidait la commission militaire.

Cinq minutes après, le soldat reparut, rapportant le billet…

En marge, le duc de Sairmeuse avait écrit de mettre à la disposition de Chupin, un sous-officier et huit hommes, choisis parmi les chasseurs de Montaignac dont on était sûr, et qu’on ne soupçonnait pas, comme tout le reste de la garnison, d’avoir fait des vœux pour le succès du soulèvement…

Le vieux maraudeur avait demandé un cheval de troupe, on lui en accorda un… Il l’enfourcha d’une jambe nerveuse, et prenant la tête du petit peloton, il partit au galop, en cavalier qui sait avoir sa fortune sous les fers de sa bête…

De ce billet, venait l’air triomphant du duc de Sairmeuse, quand il entra brusquement dans le salon où Marie-Anne et Martial négociaient déjà l’évasion du baron d’Escorval.

C’est parce qu’il avait pris à la lettre les promesses en vérité fort hasardées de son espion, qu’il s’était écrié dès la porte :

— Par ma foi !… il faut convenir que ce Chupin est un limier incomparable !… Grâce à lui…

Alors, il avait aperçu Mlle Lacheneur et s’était arrêté court…

Ni Martial ni Marie-Anne, malheureusement, n’étaient dans une situation d’esprit à remarquer la phrase et l’interruption.

Questionné, M. le duc de Sairmeuse eût peut-être laissé échapper la vérité, et très-probablement M. Lacheneur eût été sauvé.