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ÉCONOMISTE.

madame Rivard pour fixer le jour de notre mariage. J’aimerais, si c’était possible, que ça fût avant les récoltes.

— Bien, bien, comme tu voudras, Pierre ; je suis sûr que tout pourra s’arranger pour le mieux.

Après cette importante confidence, Pierre Gagnon regagna son champ d’abattis.

De retour à sa maison, Jean Rivard fit part à sa femme des intentions de son ancien compagnon de travail. Après avoir commenté cet événement d’une manière plus ou moins sérieuse, ils firent venir Françoise.

Eh bien ! Françoise, dit Jean Rivard, es-tu toujours disposée à te marier ?

— Moi me marier ! s’écria Françoise toute ébahie et croyant que son maître voulait se moquer d’elle, oh ! non, jamais ; je suis bien comme ça, j’y reste : et elle retourna de suite à sa cuisine avant qu’on pût s’expliquer davantage.

Cependant une fois seule, elle se mit à penser… et quoiqu’elle fût encore loin de soupçonner ce dont il s’agissait, elle s’avança de nouveau vers ses maîtres :

Madame Rivard sait bien, dit-elle, qu’il n’y en a qu’un avec qui je me marierais, et celui-là ne pense pas à moi. Pour les autres, je n’en donnerais pas une coppe.

Mais si c’était celui-là qui te demanderait en mariage, dit madame Rivard.

— Pierre Gagnon s’écria Françoise ; ah ! Jésus Maria ! jamais je ne le croirai !…

— C’est pourtant bien le cas, c’est Pierre Gagnon lui-même.