Page:Gérin-Lajoie - Jean Rivard, économiste, 1876.djvu/17

Cette page a été validée par deux contributeurs.
18
JEAN RIVARD

« 10 Septembre. — Ouf ! quel ennui ! voilà un importun, qui, sous prétexte de me demander conseil sur le projet qu’il a de s’établir dans le canton, me fait perdre près d’une heure à me parler de chevaux. Avec quel enthousiasme il m’a raconté l’histoire de tous les chevaux qu’il a achetés depuis qu’il est au monde ! C’est, je suppose, un maquignon de profession. J’espère au moins que notre canton n’aura pas l’honneur de compter ce maquignon au nombre de ses habitants. »

« 6 Octobre. — Oh ! certes, voilà que notre localité devient célèbre ! Un docteur vient s’offrir pour soigner nos malades ! Jusqu’à présent nous avons dû courir à Lacasseville chaque fois qu’il a fallu avoir un médecin, ce qui n’est pas arrivé très-souvent, Dieu merci ! Madame Landry qui a prêté volontiers son assistance aux femmes, a presque toujours remplacé le docteur. Quoique je ne ressemble guère au grand Napoléon, soit dit sans vouloir démentir Pierre Gagnon, je pense comme lui que le monde n’en irait pas plus mal, s’il n’y avait pas autant de médecins. Le bon air, l’exercice, la diète sont les meilleurs médecins dans les trois quarts des maladies. Je ne puis cacher toutefois qu’un chirurgien habile ne serait pas inutile dans une place nouvelle comme la nôtre, où des accidents de diverses sortes, fractures de membres, brûlures, coupures, arrivent au moment où on s’y attend le moins.

« Je n’ai donc pas rejeté les offres de notre jeune postulant : mais après lui avoir exposé le peu de ressources de notre canton, l’état de gêne de la plupart des habitants, je l’ai engagé à prendre un lot de terre, et à cultiver tout en exerçant son art, chaque