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20.

Réponse de Schiller à la lettre précédente.
Le 23 novembre 1795.

Votre mauvaise humeur contre les Stolberg, Lichtenberg et consorts s’est communiquée à moi, et je serais enchanté que vous leur appreniez à vivre. Après tout, c’est l’histoire du jour. Il n’en a jamais été autrement, et jamais autrement il n’en sera. Soyez sûr que si vous avez une fois écrit un roman ou une comédie, il vous faudra faire à perpétuité des romans et des comédies. On n’attend, on n’admet pas autre chose de vous. Si le célèbre Newton[1] avait débuté par une comédie, on lui aurait longtemps contesté non-seulement son optique, mais son astronomie elle-même. Si vous vous étiez amusé à publier vos découvertes en optique sous le nom de notre professeur Voigt, ou de tel autre héros de la chaire académique, vous auriez fait merveille. C’est bien moins encore contre l’innovation que contre la personne dont elle émane que ces Philistins se déchaînent si fort.

Je voudrais bien voir de mes yeux le delictum Stolberg. Si vous pouvez me l’envoyer par la poste, vous me feriez grand plaisir. La présomption et l’impuissance sont unies à un tel degré dans cet homme que je ne puis en avoir pitié. Cet extravagant de Benisch, le Berlinois, qui se mêle de tout, a lu aussi la critique des Heures ; et, dans le premier feu, il a écrit sur moi et mon caractère d’écrivain un article qui doit me servir d’apologie contre ces critiques. Heureusement qu’un de mes amis l’a reçu en manuscrit de Genz[2], au journal duquel il était destiné, et en a empêché l’impression. Mais je ne suis pas sûr qu’il ne le fera pas paraître ailleurs. C’est un malheur fait pour moi, au milieu de tant et de si violents ennemis, d’avoir surtout à craindre la mala-

  1. Newton, l’un des plus illustres savants des temps modernes.
  2. Friederich von Genz, né en 1764 à Breslau, mort en 1832, est un prosateur de mérite, qui a dirigé successivement le nouveau journal mensuel allemand (die neue deutsche Monatsschrift) auquel il est fait ici allusion, et le journal historique, fondé en 1799.