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19.

Lettre de Gœthe. Attaques dirigées contre ses écrits et ses travaux scientifiques ; ouvrages qu’il prépare.

Avez-vous déjà lu l’odieuse préface dont Stolberg[1] a fait précéder ses Dialogues platoniciens ? Ses attaques sont si absurdes et si inconvenantes que j’ai grande envie d’aller le trouver et de lui infliger une bonne correction. Il est très-facile de faire ressortir la sotte injustice de cette plèbe bornée ; on a de son côté le public raisonnable, et il y a une sorte de guerre déclarée à la médiocrité, qu’il nous faut poursuivre dans toutes les branches de l’art. Par la secrète conspiration du silence, de la folie et de la sottise, qu’elle a tramée contre nous, elle mérite depuis longtemps que nous lui rendions les honneurs qui lui sont dus, et que, dans la suite, nous ne l’oubliions pas.

À propos de mes travaux scientifiques, que je rassemble peu à peu, je vois que ce serait chose doublement nécessaire et qu’il ne faut pas négliger. Je suis prêt à me mettre très-franchement à la besogne contre les critiques, les journalistes, les écrivains de revues et les auteurs de compte rendus, à m’en expliquer très-librement devant le public dans un avant-propos ou un appendice, et à ne laisser passer dans ce cas à personne ses trahisons et ses réticences.

Que pensez-vous, par exemple, de Lichtenberg[2], avec qui

  1. Stolberg (le comte Frédéric-Léopold de), né en 1750 à Bramstedt (Holstein), mort en 1819 ; poëte distingué, dont Bole ne craint pas de comparer les œuvres lyriques à celles de Klopstock ; il fit d’abord partie de l’alliance de Gœttingue (Göttinger Bund) et se montra républicain exalté ; mais plus tard, lorsque éclata la révolution française, il changea complétement d’opinion, et, dans les premières années de ce siècle, il embrassa ouvertement le catholicisme ; il avait rempli plusieurs postes diplomatiques.
  2. Lichtenberg, né en 1742 à Ober-Ramstadt près de Darmstadt, mort en 1799, s’est surtout occupé de l’étude des mathématiques et de la physique ; il a cependant composé plusieurs écrits sur la littérature allemande ; en particulier, sur le théâtre et le roman ; on a conservé de lui ses lettres écrites d’Angleterre (1775).