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comme des princes ; le gain les rendit entreprenants ; ils firent des paris extravagants et, la chance les ayant abandonnés, ils perdirent non-seulement l’argent gagné, mais encore leur maigre boursicot.

« Ce fut au tour de l’étranger de ricaner avec un sourire diabolique et des éclats de voix qui donnaient froid dans le dos. En manière de plaisanterie, il offrit aux dépouillés de leur donner un moyen de continuer le jeu ; il compta devant chacun d’eux 20 louys d’or, et les cédait si les Géromhèyes voulaient, en échange, vendre leur âme au diable. Les pièces d’or étaient toutes erlihantes (reluisantes), c’était vraiment une tentation du démon! Cependant comme le marché était grave, les plus intrépides joueurs hésitaient ; l’étranger devenait plus souriant, plus pressant que jamais…

« Finalement, le démon du jeu l’emporta ; les pièces d’or étaient si près et le diable si loin que le marché fut accepté et les boules envoyées avec une nouvelle activité.

« En peu d’instants les Géromhèyes perdirent leur or si mal acquis, l’étranger trichait au jeu ; furieux, ils allaient se jeter sur lui, lorsque tout à coup, il frappa du pied, la terre se fendit, et il en sortit des flammes qui l’environnèrent complètement ; ses habits, disparus comme par enchantement, laissèrent apercevoir à nos joueurs terrifiés Lucifer en personne avec son corps velu, sa queue de singe, ses griffes de chat ; sa bouche enflammée et grimaçante lançait des gerbes de feu ; il disparut en leur hurlant : « Au revoir! »

« Brusquement, le brasier s’éteignit, les flammes disparurent, et nos joueurs, fous de peur, se trouvèrent plongés dans les ténèbres les plus épaisses. La chouette, au fond du bois, chantait son air de mort ; la mannihennequin traversait les airs avec son cortège infernal ; à la Beheuille et à la Roche-du-Diable on entendait le sabbat des sorciers