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4S LIVRE II. LA PAMILLZ.

Fille, elle assistait aux actes religieux de son père ; mariée, à ceux de son mari.

On pressent par cela seul le caractère essentiel de l'union conjugale chez les anciens. Deux familles vivent à côté l'une de l'autre, mais elles ont des dieux différents. Dans l'une d'elles, une jeune fille prend part, depuis son enfance, à la religion de son père; elle invoque son foyer; elle lui offre cha- que jour des libations, l'entoure de fleurs et de guirlandes aux jours de fête, lui demande sa protection, le remercie de ses bienfaits. Ce foyer paternel est son dieu. Qu'un jeune homme de la famille voisine la demande en mariage, il s'agit pour elle de bien autre chose que de passer d'une maison dans une ^autre. 11 s'agit d'abandonner le foyer paternel pour aller invo-

"^uer désormais le foyer de l'épqux. 11 s'agit de changer de religion, de pratiquer d'autres rites et de prononcer d'autres prières. 11 s'agit de quitter le dieu de son enfance pour se B(iettre sous l'empire d'un dieu qu'elle ne connaît pas. Qu'elle n'espère pas rester fidèle à l'un en honorant l'autre, car dans cette religion c'esit un principe immuable qu'une même per- sonne ne peut pas invoquer deux foyers ni deux séries d'an- cêtres. « A partir du mariage, dit un ancien, la femme n'a plus rien de commun avec la religion domestique de ses pères : elle sacrifie au foyer du mari* ».

Le mariage est donc un acte grave pour la jeune fille, non moins grave pour l'époux. Car cette religion veut que l'on soit né près du foyer pour qu'on ait le droit d'y sacrifier. Et cependant il va introduire près de son foyer une étrangère ; avec elle il fera les cérémonies mystérieuses de soaculte, il lui révélera les rites et les formules qui sont le patrimoine de sa famille. Il n'a rien de plus précieux que cet héritage-, ces dieux, ces rites, ces hymnes, qu'il tient de ses pères, c'est ce qui le protège dans la vie, c'est ce qui lui promet là richesse, le bon- heur, la vertu. Cependant, au lieu de garder pour soi cette

' puissance tutélaire, comme le sauvage garde son idole ou son amulette, il Ta admettre une fenuoae à la partager avec lui.

1. DioéarqM, «té pv Étituit d« Byui««, v*

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