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454 LIVRE V. LE RfiOlME MUNICIPAL DISPARAITi

On ne voit pas que ni la Grèce entière ni même une ville grecque ait formellement demandé ce droit de cité si désiré; jiais les hommes travaillèrent individuellement à l'acquérir, et Rome s'y prêta d'assez bonne grâce. Les uns l'obtinrent de la faveur de l'empereur-, d'autres Tachetèrent; on l'accorda à ceux qui donnaient trois enfants à la société, ou qui servaient dans certains corps de l'armée; quelquefois il suffit pour l'ob- tenir d'avoir construit un navire de commerce d'un tonnage déterminé, ou d'avoir porté du blé à Rome. Un moyen lacite et prompt de l'acquérir était de se vendre comme esclave à un citoyen romain; car l'affranchissement dans les formes légales conduisait au droit de cité*.

L'homme qui possédait le titre de citoyen romain ne faisait plus partie civilement ni politiquement de sa ville natale. Il pouvait continuer à l'habiter, mais il y était réputé étranger ; il n'était plus soumis au* lois de la ville, n'obéissait plus à ses magistrats, n'en supportait plus les charges pécuniaires*. C'était la conséquence du vieux principe qui ne permettait pas qu'un même homme appartînt à deux cités à la fois *. Il arriva naturellement qu'après quelques générations il y eut dans chaque ville grecque un assez grand nombre d'hommes, et c'étaient ordinairement les plus riches, qui ne reconnaissaient ni le gouvernement ni le droit de cette ville. Le régime muni- cipal périt ainsi lentement et comme de mort naturelle. Il vint un jour oii la cité fut un cadre qui ne renferma plus rien, où les lois locales ne s'appliquèrent presque plus à personne, où les juges municipaux n'eurent plus de justiciables.

Enfin, quand huit ou dix générations eurent soupiré après le droit de cité romaine, et que tout ce qui avait quelque valeur l'eut obtenu, alors parut un décret impérial qui l'ac- sorda à tous les hommes libres sans distinction.

Ce qui est étrange ici, c'est qu'on ne peut dire avec certitude

1. Suétone, Néron, 24. Pétrone, 57. Ulpien, III. Gaius, I, 16, 17.

2. Il devenait un étranger à l'égard de sa famille même, si elle n'avait pas eomnM lui le droit de cité. Il n'héritait pas d'elle. Pline, Panégyrique, 37.

3. Cicéron, pro Balbo, 28 ; pro Archia, 5 ; pro Cxcina, 36. Cornélius Nepos, Atticus, 3. La Grèce avait depuis longtemps abandonné ce principe; mais Rome s'j ten.iit fldèlement.

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