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444 LIVRE V. LE RÉGIME MUNICIPAL DISPARAIT.

fixes pour les gouverner. L'autorité même qu'elle exerçait sur eux n'avait rien de régulier. Comme ils ne faisaient pas partie de son État, de sa cité, elle n'avait sur eux aucune action lé- gale. Ses 'sujets étaient pour elle des étrangers \ aussi avait- elle vis-à-vis d'eux ce pouvoir irrégulier et illimité que l'ancien droit municipal laissait au citoyen à l'égard de l'é- tranger ou de l'ennemi. C'est sur ce principe que se régla longtemps l'administration romaine, et voici comment elle procédait.

Rome envoyait un de ses citoyens dans un pays ; elle faisait de ce pays la. province de cet homme, c'est-à-dire sa charge, son soin propre, son affaire personnelle ; c'était le sens du mot provincîa dans l'ancienne langue. En même temps, elle confé- rait à ce citoyen Vimperiv/m; cela signifiait qu'elle se dessai- sissait en sa faveur, pour un temps déterminé, de la souverai- neté qu'elle possédait sur le pays. Dès lors, ce citoyen repré- sentait en sa personne tous les droits de la république, et, à ce titre, il était un maître absolu. 11 fixait le chiffre de l'impôt; il exerçait le pouvoir militaire ; il rendait la justice. Ses rapports avec les sujets ou les alliés n'étaient réglés par aucune consti- tution. Quand il siégeait sur son tribunal, il jugeait suivant sa seule volonté ; aucune loi ne pouvait s'imposer à lui, ni la loi des provinciaux, puisqu'il était Romain, ni la loi romaine, puis- qu'il jugeait des provinciaux. Pour qu'il y eût des lois entre lui et ses administrés, il fallait qu'il les eût faites lui-même ; car lui seul pouvait se lier. Aussi Vmvperium dont il était revêtu, comprenait-il la puissance législative. De là vient que les gouverneurs eurent le droit et contractèrent l'habitude de publier, à leur entrée dans la province, un code de lois qu'ils appelaient leurÉdit, et auquel ils s'engageaient moralement à se conformer. Mais comme les gouverneurs changeaient tous les ans, ces codes changèrent aussi chaque année, par la rai- son que la loi n'avait sa source que dans la volonté de l'homire momentanément revôtu de Vimperium. Ce principe était si rigoureusement appliqué que, lorsqu'un jugement avait été prononcé par le gouverneur, mais n'avait pas été entièrement exécuté au moment de son départ de la province, l'arrivée da

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