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CHAP, 11. LA CONQUÊTE ROMAINE. 443

tomptes au gouverneur de la province, qui recevait aussi les appels de leurs juges <. Or, telle était la nature du régime municipal chez les anciens qu'il lui fallait une indépendance complète ou qu'il cessait d'être. Entre le maintien des institu- tions de la cité et la subordinalion k un pouvoir étranger, il y avait une contradiction, qui n'apparaît peut-être pas claire- ment aux yeux des modernes, mais qui devait frapper tous les hommes de cette époque. La liberté municipale et l'empire de Rome étaient inconciliables \ la première ne pouvait être qu'une apparence, qu'un mensonge, qu'un amusement bon à occuper les hommes. Chacune de ces villes . envoyait, presque chaque année, une députation à Rome, et ses affaires les plus intimes et les plus minutieuses étaient réglées dans le Sénat. Elles avaient encore leurs magistrats municipaux, archontes et stratèges, librement élus par elles ; mais l'archonte n'avait plus d'autre attribution que d'inscrire son nom sur les regis- tres publics pour marquer l'année, et le stratège, autrefois chef de l'armée et de l'État, n'avait plus que le soin de la voirie et l'inspection des marchés*.

Les institutions municipales périssaient donc aussi bien chez les peuples qu'on appelait alliés que chez ceux qu'on ap- pelait "sujets ; il y avait seulement cette différence que les pre- miers en gardaient encore les formes extérieures. A vrai dire, la cité, telle que l'antiquité l'avait conçue, ne se voyait plus nulle part, si ce n'était dans les murs de Rome *.

D'ailleurs Rome, en détruisant partout le régime de la cité, ne mettait rien à la place. Aux peuples à qui elle enlevait leurs institutions, elle ne donnait pas les siennes en échange. Elle ne songeait même pas à créer des • institutions nouvelles qui fussent à leur usage. Elle ne fit jamais une constitution pour les peuples de son empire, et ne sut pas établir des règles

1. Tile-Live, XLV, 18. Cicéron, ad AU., VI, 1; VI, J. Appien, Guerreê dviU», l, 102. Tacite, XV, 45.

2. Philostrate, Vie de» sophiste», I, 33. Bœckh, Corp. insor., passim.

3. Plus tard, Rome a relevé partout le régime municipal ; mais il faut bien en- tendre que ce régime municipal de l'empire ne ressemblait que par les^lehois à celui des temps antérieurs; il n'en avait ni les principes ni l'esprit. La cité gauloise où grecque dn tiiclt dei Antoniu est autre chose que la cité antique.

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