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CBAP. II. LA CONQUETE ROMAINE. 441

romaine eut pour premier résultat d'achever de les détruire, et (l'effacer ce qui en subsistait encore. C'est ce qu*on peut voir en observant dans quelle condition les peuples tombèrent à mesure qu'ils furent soumis par Rome.

Il faut d'abord écarter de notre esprit toutes les habitudes de Ja politique moderne, et i>e pas nous représentei'^es peuples entrant l'un après l'autre dans l'État romain, comme, de nos jours, des provinces conquises sont annexées à un royaume qui, en accueillant ces nouveaux membres, recule ses limites. L'État romain, civitas romana^ ne s'agrandissait pas par la conquête ; il ne comprenait toujours que les familles qui figu- raient dans la cérémonie religieuse du cens. Le territoire ro- main, ager roma/nus, ne s'étendait pas davantage; il restait enfermé dans les limites immuables que les rois lui avaient tracées et que la cérémonie des Ambarvales sanctifiait chaque année. Deux choses seulement s'agrandissaient à chaque con- quête : c'était la domination de Rome, imperium romanum, et le territoire appartenant à l'état romain, çiger publicus.

Tant que dura la république, il ne vint à l'esprit de per- sonne que les Romains et les autres peuples pussent former une même nation. Rome pouvait bien accueiUir chez elle in- dividuellement quelques vaincus, leur faire habiter ses murs, et les transformer à la longue en Romains ; mais elle ne pou- vait pas assimiler toute une population étrangère à sa popula- tion, tout un territoire à son territoire. Cela ne tenait pas à la politique particulière de Rome, mais k un principe qui était constant dans l'antiquité, principe dont Rome se serait plus volontiers écartée qu'aucune autre ville, mais dont elle ne pouvait pas s'affranchir entièrement. Lors donc qu'un peuple était assujetti, il n'entrait pas dans l'État romain, in civitate, mais seulement dans la domination romaine, m imperio. Il ne s'unissait pas à Rome, comme aujourd'hui des provinces sont unies à une capitale; entre leâ peuples et elle, Rome ne connaissait que deux sortes de lien, la suiétion ou l'allianc* {dedititii, socii).

11 semblerait d'après cela que les institutions municipales dussent subsister chez les vaincus, et que le monde dût être

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