Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1920.djvu/447

Cette page n’a pas encore été corrigée

CHAP. n. LA CONQUÊTE ROMAINE. 439

dessus de lui et ne lui fit jamais uno véritable opposition.

Rome était donc, au troisième et au second siècle avant notre ère, la ville la plus aristocratiquement gouvernée qu'il y eût en Italie et en Grèce. Remarquons enfin que, si dana les affaires intérieures le Sénat était obligé de ménager la foule, pour ce qui concernait la politique extérieure il étaii maître absolu. C'était lui qui recevait les ambassadeurs, qui concluait les alliances, qui distribuait les provinces et les lé- gions, qui ratifiait les actes des généraux, qui déterminait les conditions faites aux vaincus; toutes choses qui, partout ailleurs, étaient dans les attributions de l'assemblée populaire. Les étrangers, dans leurs relations avec Rome, n'avaient donc jamais affaire au peuple; ils n'entendaient parler que du Sénat, et on les entretenait dans cette idée que le peuple n'avait aucun pouvoir. C'est là l'opinion qu'un Grec exprimait à Flamininus : « Dans votre pays, disait-il, la richesse gouverne, et tout le reste lui est soumis'. >

11 résulta de là que, dans toutes les cités, Taristocratie tourna les yeux vers Rome, compta sur elle, l'adopta pour protectrice, et s'enchaîna à sa fortune. Cela semblait d'autant plus permis que Rome n'était pour personne une ville étran- gère : Sabins, Latins, Étrusques voyaient eh elle une ville Sa- bine, une ville latine ou une ville étrusque, et les Grecs croyaient retrouver en elle des Grecs.

Dès que Rome se montra àla Grèce (199 avant Jésus-Christ), l'aristocratie se livra à elle. Presque personne alors ne pen- sait qu'il y eût à choisir entre" l'indépendance et la sujétion; pour la plupart des hommes, la question n'était qu'entre l'aris- tocratie et Ifr parti populaire. Dans toutes les villes, celui-ci était pour Philippe, pour Antiochus ou pour Persée, celle-là pour Rome. On peut voir dans Polybe et dans Tite-Live que si en 198, Argos ouvre ses portes aux Macédoniens, c'est que le peuple y domine; que, l'année suivante, c'est le parti des riches qui livre Opunte aux Romains ; que, chez les Acarna- Diens, l'aristocratie fait un traité d'alliance avec Rome, mais

t. Tlto-LiTe, XXXIV, tU

�� �