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GHAP. VU. PROGRÈS DE LA PLÈBE. 347

devenir au milieu des Latins, des Sabins, des Étrus(iues, tous ennemis? La plèbe avait du bon; que ne savait-on la faire servir aux intérêts de la cité? Ces sénateurs souhaitaient donc qu'au prix de quelques sacrifices, dont ils ne prévoyaient peut- être pas toutes les conséquences, on ramenât dans la vill«  ces milliers de bras qui faisaient la force des légions.

D'autre part, la plèbe s'aperçut, au bout de peu de mois, qu'ell( ne pouvait pas vivre sur le mont Sacré. Elle se procurait bieo ce qui était matériellement nécessaire à l'existence, mais tout ce qui fait une société organisée lui manquait. Elle ne pouvait pas <"ïider là une ville, car elle n'avait pas de prêtre qui sût accomplir la cérémonie religieuse de la fondation. Elle ne pouvait pas se donner de magistrats, car elle n'avait pas de prytanée régulièrement allumé où un magistrat eût l'occasion de sacrifier. Elle ne pouvait pas trouver le fondement des lois sociales, puisque les seules lois dont l'homme eût alors l'idée dérivaient de la religion patricienne. En un mot, elle n'avait pas en elle les éléments d'une cité. La plèbe vit bien que, pour être plus indépendante, elle n'était pas plus heu- reuse, qu'elle ne formait pas une société plus régulière qu'à Rome, et qu'ainsi le problème dont la solution lui importait si fort n'était pas résolu. Il ne lui avait servi de rien de s'é- loigner de Rome ; ce n'était pas dans l'isolement du mont Sacré qu'elle pouvait trouver les lois et les droits auxquels elle aspirait.

Il se trouvait donc que la plèbe et le patriciat, n'ayant presque rien de commun, ne pouvaient pourtant pas vivre l'un sans l'autre. Us se rapprochèrent et conclurent un trait d'alliance. Ce traité paraît avoir é'( fait dans les mêmes formes que ceux qui terminaient une guerre entre deux peuples difîérents-, plèbe et patriciat n'étaient, en effet, ni un même peuple, ni une même cité '. Par ce traité, le patriciat n'accorda pas que la plèbe fit partie de la cité religieuse et

1. Tile-LiTC, IV, 6 : Fœdere icto cum plèbe. Denys, VI, 89, nomme formell»- ment les féciaux. Le texte de ce traité, qu'on appela lex sacrata, se conserva long- temps à Rome; Oenys en cite des extrait« (VL 89; X, 33; X, 43); cf. Festua, p. SI».

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