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L'État n'admettait pas qu'un homme fût indifférent à ses intérêts -, le philosophe, l'homme d'étude n'avait pas le droit de vivre à part. C'était une obligation qu'il votât dans l'assemblée et qu'il fût magistrat à son tour. Dans un temps où les discordes étaient fréquentes, la loi athénienne ne permettait pas au citoyen de rester neutre ; il devait combattre avec l'un DU avec l'autre parti; contre celui qui voulait demeurer à l'écart des factions et se montrer calme, b loi prononçait une peine sévère, la perte du droit de cité'.

Il s'en fallait de beaucoup que l'éducation fût libre chez les Grecs. Il n'y avait rien, au contraire, où l'État tînt davantage à être maître. A Sparte, le père n'avait aucun droit siir l'éducation de son enfant. La loi paraît avoirété moins rigoureuse à Athènes; encore la cité faisait-elle en sorte que l'éducation fût commune sous des maîtres choisis par ^lle. Aristophane, dans un passage éloquent, nous montre les enfants d'Athènes se rendant à leur école ; en ordre, distribués par quartiers, ils marchent en rangs serrés, parla pluie, par la neige ou au grand soleil ; ces enfants semblent déjà comprendre que c'est un devoir civique qu'ils remplissent*. L'État voulait diriger seul l'éducation, et Platon dit le motif de cette exigence* : « Les parents ne doivent pas être libres d'envoyer ou de ne pas envoyer leurs enfants chez les maîtres que la cité a choisis; car les enfants sont moins à leurs parents qu'à la cité. » L'État considérait le corps et l'âme de chaque citoyen comme lui appartenant; aussi voulait-il façonner ce corps et cette âme de manière à en tirer le meilleur parti. Il lui enseignait la gymnastique, parce que le corps de l'homme était une arme pour la cité, et qu'il fallait que cette arme fût aussi forte et aussi maniable que possible. Il lui enseignait aussi les chants religieux, les hymnes, les danses sacrées, parce que cette connaissance était nécessaire à la bonne exécution des sacrifices et des fêtes de la cité'.

On reconnaissait à l'État le droit d'empêcher qu'il y eût un enseignement libre à côté du sien. Athènes fit un jour une loi

1. Plutarque, Solon, W.

2. Aristophane, Nuées, 96o-98i. — 3. Platon, Lois, VII.

3. Aristophane, Nuées. 966-MI. De même à Sparte: Plutarque, Lycurgue, }|.