Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1920.djvu/216

Cette page n’a pas encore été corrigée

t08 LIVRE III. LA. CITÉ.

dans la maison. La croyance, l'indiscutable et impérieuse croyance, disait que le prêtre héréditaire du foyer était Ib dépositaire des choses saintes et le gardien des dieux. Com- ment hésiter à obéir à un tel homme? Un roi était un être sacré; PaaiXeri; Upol, dit Pindare. On voyait en lui, non pas tout à fait un dieu, mais du moins « l'homme le plus puis- sant pour conjurer la colère des dieux ' », l'homme sans le secours duquel nulle prière n'était efficace, nul sacrifice -n'était accepté.

Cette royauté demi -religieuse et demi -politique s'établit dans toutes les villes, dès leur naissance, sans efforts de la part des rois, sans résistance de la part des sujets. Nous ne voyons pas à l'origine des peuples anciens les fluctuations et les luttes qui marquent le pénible enfantement des sociétés modernes. On sait combien de temps il a fallu, après la chute de l'empire romain, pour retrouver les règles d'une société régulière, L'Europe a vu durant des siècles plusieurs principes opposés se disputer le gouvernement des peuples, et les peuples 8€ refuser quelquefois à toute organisation sociale. Un tel spectacle ne se voit ni dans l'ancienne Grèce ni dans l'ancienne Italie; leur histoire ne commence pas par des conflits; les révolutions n'ont paru qu'à la fiiy Chez ces populations, la société s'est formée lentement, kmguement, par degrés, en passant de la famille à la tribu et de la tribu à la cité, nïais sans . secousses et sans luttes. La royauté s'est établie tout naturellement, dans la famille d'abord, dans la cité plus tard. Elle ne fut pas imaginée par l'ambition de quelques-uns; elle naquit d'une nécessité qui était manifeste aux yeux de tous. Pendant de longs siècles, elle fut paisible, honorée, obéie. Les rois n'avaient pas besoin de la force matérielle ; ils n'avaient ni armée ni finances; mais soutenue par des croyances qui étaient puissantes sur l'âme, leur autorité était sainte et in- violable.

Plus tard, une révolution, dont nous parlerons ailleurs, ren- versa la royauté dans toutes les villes. Mais en tombant elle ne

1. Sopliocle. Œdipe roi, ii.

�� �