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ontre l'inconstance de ses dieux. Mais il n'y fallait changer li un mot ni une syllabe, ni surtout le rhythme suivant lequel

lie devait être chantée. Car alors la prière eût perdu sa force , et les dieux fussent çestés libres <.

Mais la formule n'était pas assez : il y avait encore des actes extérieurs dont le détail était minutieux et immuable. Les moindres gestes du sacrificateur et les moindres parties de son costume étaient réglés. En s'adressant à un dieu, il fallait avoir la tête voilée; à un autre, la tête découverte ; pour un troisième, le pan de la toge devait être relevé sur l'épaule. Dans certains actes, il fallait avoir les pieds nus. 11 y avait des prières qui n'avaient d'efficacité que si l'homme, après les avoir prononcées, pirouettait sur lui-même de gauche à droite. La nature de la victime, la couleur de son poil, la manière de l'é- gorger, la forme du couteau, l'espèce de bois qu'on devait employer pour faire rôtir les chairs, tout cela était réglé pour chaque dieu par la religion de chaque famille ou de chaque cité. En vain le cœur le plus fervent offrait-il aux dieux les plus grasses victimes ; si l'un des innombrables rites du sacri- fice était négligé, le sacrifice était nul. Le moindre manque- ment faisait d'un acte sacré un acte impie. L'altération la plus légère troublait et bouleversait la religion de la patrie, et transformait les dieux protecteurs en autant d'ennemis cruels. C'est pour cela qu'Athènes était sévère pour le prêtre qui chan- geait quelque chose aux anciens rites*; c'est pour cela que le

��1 Sur les TÏeux hymnes que les Grecs continuaient à chanter dans les cérémo- Bies, voy, Pausanias, I, 18 ; VII, 15, in fine ; VII, 21 ; IX, 27, 29, 30. Cicéron, De legibus, II, 15, fait remarquer que les villes grecques étaient attentives à conserver les rhythmes anciens, aniiquumvocumservare modum. Platon, Lois Vil p. 799- 400, se conforme aux anciennes règles, quand il prescrit que les chants et le ^ rhythmes restent immuables. — Chez les Romains, les formules de prières étaient Uiées par un rituel; voyez Varron, De ling. lat., et Caton, passim. Quintilien, I, il : Saliorum car mina, vix êocerdoiibus suis inteUecta, mutari vetat religit tu eonsecratiê utendurrt, est.

7. Démosthëne, in Nearam, 116, 117. Varron cit« quelques mots des libri sa- rorum qui se conservaient à Athènes, «t dont la langue était archaïque {De ling, a t., V, 97). — Sur le respect des Grecs pour les vieux ritea, voyez quelques exem- ples curieux dans Plutarque, Qitest. greeq., 26, 31, 35, 36, 5S. La pensée ancieoue st bien exprimé* par Uocrat*, Aréopagitique, 3»-S0, et daas tout 1« pUidoyet Mire Néère

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