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194 LIVRE III. LA CÏTB.

instants de sa vie, fixait toutes ses habitudes. Elle gouveravi Têtre humain avec une autorité si absolue qu'il ne restait hea

qui fût en dehors d'elle.

Ce serait avoir une idée bien fausse de la nature humaine que de croire que cette religion des anciens était une imposture et pour ainsi dire une comédie. Montesquieu prétend que les Romains ne se sont donné un culte que pour brider le peuple. Jamais religion n'a eu une telle origine, et toute religion qui en est venue à ne se soutenir que par cette raison d'utilité publi- que, ne s'est pas soutenue longtemps. Montesquieu dit encore que les Romains assujettissaient la religion à l'État; le con- traire'est plus vrai ; il est impossible de lire quelques pages de Tite-Live sans être frappé de l'absolue dépendance où les hommes étaient à l'égard de leurs dieux. Ni les Romains ni les Jrecs n'ont connu ces tristes conflits qui ont été si communs dans d'autres sociétés entre l'Église et l'État. Mais cela tient uniquement à ce qu'à Rome, comme à Sparte et à Athènes, l'État était asservi à la religion. Ce n'est pas qu'il y ait jamais eu un corps de prêtres qui ait imposé sa domination. L'État ancien n'obéissait pas à un sacerdoce, c'était à sa religion même qu'il était soumis. Cet État et cette religion étaient si complètement confondus ensemble qu'il était impossible, non- seulement d'avoir l'idée d'un conflit entre eux, mais laême de les distinguer l'un de l'autre.

��CHAPITRE Vm.

XaM rituels et les annales.

Le caractère et la vertu de la religion des anciens n'était pas d'élever l'intelligence humaine à la conception de l'absolu, d'ouvrir à l'avide esprit une route éclatante au bout de laquelle il crût entrevoir Dieu. Cette religion était un ensemble mal lié de petites croyances, de petites pratiques, de rites minutieux. 11 n'en fallait pas chercher le sens; il n'y avait pas à réfléchir, à se rendre compte. Le mot religion ne signifiait pas ce qu'ii

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