Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1920.djvu/163

Cette page n’a pas encore été corrigée

CBÀP. IV. LA VILLB. 155

Ne voyons-nous pas encore dans cette tradition la véritable pensée" de ces anciens hommes ? En déposant dans la fossa une motte de terre de leur ancienne patrie, ils avaient cru y enfermer aussi les âmes de leurs ancêtres. Ces âmes, réunies là, devaient recevoir un culte perpétuel et veiller sur leurs descendants. Romulus à cette même place posa un autel et y alluma du feu. Ce fut le foyer de la cité ".

Autour de ce foyer doit s'élever la ville, comme la maisoa s'élève autour du foyer domestique. Romulus trace un sillon qui marque l'enceinte. Ici encore les moindres détails sont fixés par un rituel. Le fondateur doit se servir d'un soc de cuivre; sa charrue est traînée par un taureau blanc et une vache blanche. Romulus, la tète voilée et sous le costume sa- cerdotal, tient lui-même le manche de la charrue et la dirige en chantant des prières. Ses compagnons marchent derrière lui en observant un silence religieux. A mesure que le soc soulève des mottes de terre, on les rejette soigneusement à l'in- térieur de l'enceinte, pour qu'aucune parcelle de cette terre sacrée ne soit du côté de l'étranger ».

Cette enceinte tracée par la religion est inviolable. Ni étran- ger ni citoyen n'a le droit de la franchir. Sauter par-dessus ce petit sillon est un acte d'impiété ; la tradition romaine disait que le frère du fondateur avait commis ce sacrilège et l'avait payé de sa vie*.

��Ireê die» qtio* retigioeo» judiecmerunt quod hit diebu» ea qua oeeuUa religiO' ni» deorum manium ettent, m lucem adducerentur.

1. Ovide, Fastes, IV, 823. Fotsa repletur humo plenxque imponitur ara. Et novu» accenso fungitur igné focus. Le foyer fut déplacé plus tard. Lorsque les trois villes du Palatin, du Capitolin et du Quirinal, s'unirent en une seule, le foyer commun ou temple de Vesta fut placé sur un terrain neutre entre les trois collines.

2. Plutarque, RomvAxu, U. Denys d'Halic, I, 88. OTide, Fastes, ÏW, 825 et 8U1V. — Varron, De ling. lat , V, 143 : Oppida condebani in Latio, Etrusco ritu ; junclis bobus, tauro et vacca interiore, aratro circumagebant sulcutn; 'loc faciebant religionis causa, die auspicato. Terram unde exculpserant lot- sam vocabanl et inlrorsum jactam mui^m. Festus, éd. Mûller, p. 375 : Urvat...» ab eo sulco qui fit in urbe condenda sulco aratri. Ces règles étaient tellement connues et usitées que Virgile, décrivant la fondation d'une ville, commence par décrire cette pratique : Inlerea /Eneas urbem désignât aratro (V, 755).

3. Plutarque, Quest. rom., 27 : to T(txo< (>f(iv' o&tm |if isxtl 'Pu|;lû)io( ««mwba

�� �